Prescrire pour préserver ou restaurer la fonction sexuelle

Plusieurs psychotropes peuvent provoquer une dysfonction érectile (DE) et d’autres problèmes sexuels (tableaux 1 et 2). Cet effet secondaire peut décourager l’observance du traitement et compromettre les résultats.

Cet article propose des stratégies fondées sur des preuves pour prévenir et traiter la DE induite par les psychotropes. Nous passons également en revue les informations que les psychiatres doivent partager avec les médecins de soins primaires lorsqu’ils traitent un patient souffrant de DE.

Rapport de cas : Une bonne relation

Monsieur A, âgé de 52 ans, a connu une diminution de sa fonction érectile depuis 6 mois et ne peut maintenant plus avoir d’érection. Sa relation avec sa femme est bonne ; il attribue la perte de libido à son problème d’érection.

Fumeur d’un paquet par jour depuis l’âge de 18 ans, Monsieur A souffre de diabète de type 2 et prend de la metformine, 850 mg bid, depuis 2 ans. Depuis environ 2 mois, il prend de la sertraline, 50 mg, pour la dépression et rapporte une amélioration significative de l’humeur, du sommeil, de la concentration et de l’appétit. Il prend également du lisinopril, 20 mg/j, pour l’hypertension, et de la simvastatine, 40 mg par nuit, pour l’hyperlipidémie.

Tableau 1

Antidépresseurs associés à des dysfonctionnements sexuels

Classe de médicaments/agent Mécanisme proposé. mécanisme Dysfonctionnement
Inhibiteurs de la monoamine oxydase Inconnu ED (rare), retard de l’éjaculation (rare)
Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine Augmentation de la prolactine sérique (possible)
Augmentation de l’inhibition relative de la dopamine et de lasérotonine
Accroissement de la sérotonine centrale
Diminution de la libido
ED
Anorgasmie Éjaculation retardée/retardée
Antidépresseurs tricycliques
. antidépresseurs Dépression du SNC
Activité anticholinergique
Diminution de la libido
ED
Venlafaxine Augmentation du taux relatif de dopamine-à l’inhibition du recaptage de la sérotonine
Augmentation de la sérotonine centrale
ED
Anorgasmie Éjaculation retardée/retardée
ED : Dysfonctionnement érectile

L’hémoglobine A1C de Monsieur A est de 9,8%, ce qui indique un mauvais contrôle du diabète. Sa tension artérielle est de 168/94 mm Hg, bien supérieure à son objectif de <135/80. Il n’a pas de douleurs thoraciques ni d’antécédents d’infarctus du myocarde ; une épreuve d’effort récente n’a révélé aucune maladie coronarienne.

Discussion. Plusieurs causes médicales – diabète, hypertension, hyperlipidémie et 34 ans de tabagisme important – pourraient expliquer la DE de M. A. Une maladie vasculaire est suspectée, bien que l’épreuve d’effort ait été négative.

Identifier une cause spécifique est crucial pour traiter la DE mais peut être difficile. Jusqu’à 80 % des cas peuvent être attribués à une ou plusieurs causes organiques.1 La dépression de M. A pourrait être un facteur, bien que les DE psychogènes ne soient pas courants. L’ajout de la sertraline, un inhibiteur sélectif du recaptage de la sérotonine (ISRS), peut également avoir aggravé sa DE.

Les autres causes possibles de la DE comprennent :

  • les médicaments non psychotropes (pour consulter une liste d’agents, voir cet article sur currentpsychiatry.com)
  • la diminution de la libido, le retard de l’orgasme et l’anorgasmie. La diminution de la libido et l’anorgasmie sont souvent diagnostiquées à tort comme des DE primaires car les symptômes de présentation sont similaires.

Le traitement des DE commence par la prise en charge des problèmes médicaux sous-jacents, bien que le contrôle optimal seul puisse ne pas soulager les DE. Encourager le patient à arrêter de fumer et proposer des stratégies de sevrage tabagique.

Alerter le médecin traitant et le patient lors de la prescription d’un psychotrope associé à des effets secondaires sexuels, et expliquer les avantages potentiels du médicament. Évaluez la fonction sexuelle de base avant de commencer le psychotrope afin de pouvoir détecter les changements dans la fonction sexuelle. Si vous pensez que la dysfonction érectile est due à un psychotrope :

  • maintenez le traitement psychotrope pendant 6 à 8 semaines pour voir si le patient développe une tolérance à ses effets secondaires sexuels.
  • diminuez la dose du psychotrope. Dans une étude2, près de 75 % des patients dont la dose d’ISRS a été réduite de moitié ont signalé une amélioration de la fonction sexuelle avec une efficacité antidépressive soutenue. Cet effet des ISRS a été reproduit et a également été démontré avec l’imipramine.3-5
  • programmer des « congés » médicamenteux de 1 à 2 jours (le week-end, par exemple) pour les médicaments ayant une demi-vie courte (comme la sertraline ou la paroxétine) si l’état sous-jacent le permet7.

Tableau 2

Autres psychotropes associés à des dysfonctionnements sexuels

Classe de médicaments/agent Mécanisme proposé Dysfonctionnement
Amphétamines Augmentation de la fréquence du syndrome nerveux sympathique relatif/activité du système nerveux parasympathique ED
Anticholinergiques Activité anticholinergique ED
Antipsychotiques (typiques et atypiques) Dépression du SNC, augmentation de la prolactine sérique
Activité anticholinergique
Blocage des récepteurs alpha1
Diminution de la fermeture du sphincter urétral interne
Diminution de la libido
ED
Éjaculation retardée
Éjaculation rétrograde
Barbituriques, benzodiazépines, dépresseurs du SNC Dépression du SNC Diminution de la libido
Carbamazépine, gabapentine Diminution de l’activité androgénique Diminution de la libido, DE, éjaculation retardée
Disulfiram Inconnu ED
Agonistes des récepteurs de la dopamine-agonistes des récepteurs de la dopamine Inconnu ED
Antagonistes des récepteurs de la dopamine Augmentation de la prolactine sérique Diminution de la libido
ED : Dysfonctionnement érectile

Si ces mesures ne fonctionnent pas, un traitement individualisé du dysfonctionnement sexuel devient nécessaire. Pour certains patients, il peut être nécessaire de changer de psychotrope pour assurer l’observance et préserver la réponse. Dans des cas comme celui de M. A, cependant, le médecin et le patient peuvent ne pas vouloir arrêter un psychotrope qui fonctionne. Pour ces patients, il faut envisager d’ajouter un médicament pour rétablir la fonction sexuelle.

Si la DE persiste après le traitement, le médecin de soins primaires peut orienter le patient vers un urologue.

Rapport de cas:Suite

Monsieur A a été conseillé d’arrêter de fumer et de contrôler sa tension artérielle et son diabète. Son médecin traitant a repris le lisinopril, 20 mg/j, augmenté sa metformine à 1 000 mg bid, et ajouté le sildénafil, 50 mg avant une activité sexuelle prévue. Monsieur A dit que le sildénafil a bien fonctionné.

Psychotropes et dysfonctionnement sexuel

Plusieurs processus physiologiques contribuent aux effets secondaires sexuels des psychotropes.

La libido est principalement une fonction de contrôle hormonal et du SNC. En revanche, les fonctions érectiles sont médiées par la stimulation parasympathique locale et l’éjaculation, qui sont contrôlées par la norépinéphrine. L’orgasme est un événement cortical cérébral distinct de l’éjaculation ; les deux processus peuvent être perturbés indépendamment. Des niveaux élevés de sérotonine centrale inhibent l’orgasme et, dans une moindre mesure, l’éjaculation. L’élévation de la dopamine au fil du temps entraîne une hyperprolactinémie et l’hypotestostéronémie qui en résulte, diminuant ainsi la libido.

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