Campagne de Gallipoli, aussi appelée campagne des Dardanelles, (février 1915-janvier 1916), dans la Première Guerre mondiale, opération anglo-française contre la Turquie, destinée à forcer le canal des Dardanelles, long de 38 miles (61 km), et à occuper Constantinople. Les autorités britanniques ont envisagé de lancer une telle opération entre 1904 et 1911, mais l’opinion militaire et navale s’y opposait. Lorsque la guerre entre les Alliés et la Turquie a commencé au début de novembre 1914, la question a été réexaminée et classée comme une opération hasardeuse, mais possible.
Le 2 janvier 1915, en réponse à un appel du grand duc Nicolas, commandant les armées russes, le gouvernement britannique accepte d’organiser une manifestation contre la Turquie afin de soulager la pression sur les Russes sur le front du Caucase. Les Dardanelles sont choisies comme lieu, une opération navale et militaire combinée étant fortement soutenue par Winston Churchill, qui est alors le premier lord de l’Amirauté. Le 28 janvier, le comité des Dardanelles décide de tenter de forcer le détroit par une action navale uniquement, en utilisant principalement des navires de guerre obsolètes et trop vieux pour une action en flotte. Le 16 février, cette décision est modifiée, car il est convenu que les rives des Dardanelles devront être tenues si la flotte passe. A cette fin, une importante force militaire sous les ordres du général Sir Ian Hamilton fut rassemblée en Égypte, les autorités françaises fournissant également un petit contingent.
Le bombardement naval commence le 19 février mais est interrompu par le mauvais temps et ne reprend que le 25 février. Des groupes de démolition de marines débarquent presque sans opposition, mais le mauvais temps intervient à nouveau. Le 18 mars, le bombardement est poursuivi. Cependant, après que trois cuirassés aient été coulés et trois autres endommagés, la marine abandonna son attaque, concluant que la flotte ne pouvait réussir sans aide militaire.
Les transports de troupes s’assemblèrent au large de l’île de Lemnos, et les débarquements commencèrent sur la péninsule de Gallipoli à deux endroits tôt le 25 avril 1915, au Cap Helles (29e division britannique et Royal Naval) et sur les plages de l’ANZAC (corps d’armée australien et néo-zélandais). Une brigade française débarque sur la côte anatolienne opposée, à Kum Kale, mais elle est ensuite retirée. Les petites têtes de pont sont protégées avec difficulté, les troupes de l’ANZAC étant retenues par des renforts turcs sous la direction du redoutable Mustafa Kemal, qui deviendra plus tard célèbre sous le nom d’Atatürk. D’importants renforts britanniques et des Dominions ont suivi, mais peu de progrès ont été réalisés. Le 6 août, un autre débarquement sur la côte ouest, à la baie de Suvla, a lieu ; après quelques progrès initiaux, l’assaut est stoppé.
En mai 1915, le premier seigneur de la mer, l’amiral Lord Fisher, avait démissionné en raison de divergences d’opinion sur l’opération. En septembre 1915, il était clair que sans nouveaux renforts importants, il n’y avait aucun espoir de résultats décisifs, et les autorités nationales décidèrent de rappeler Hamilton pour le remplacer par le lieutenant-général Sir Charles Monro. Ce dernier recommanda le retrait des forces militaires et l’abandon de l’entreprise, conseil qui fut confirmé en novembre par le secrétaire d’État à la guerre, Lord Kitchener, lors de sa visite dans la péninsule. Cette opération difficile fut menée par étapes et fut achevée avec succès au début du 9 janvier 1916.
Au total, l’équivalent de quelque 16 divisions britanniques, australiennes, néo-zélandaises, indiennes et françaises ont participé à la campagne. Les pertes du Commonwealth britannique, hormis les lourdes pertes parmi les anciens navires de guerre, s’élèvent à 213 980. La campagne n’a été un succès que dans la mesure où elle a attiré d’importantes forces turques loin des Russes. Le plan n’a pas réussi à produire des résultats décisifs en raison d’un leadership militaire médiocre dans certains cas, de tactiques défectueuses, notamment l’absence totale de surprise, de l’inexpérience des troupes, d’un équipement inadéquat et d’une pénurie aiguë d’obus.
La campagne a eu de graves répercussions politiques et diplomatiques. Elle donna l’impression dans le monde entier que les Alliés étaient militairement ineptes. Avant que l’évacuation ne soit décidée, l’administration libérale de H.H. Asquith est supplantée par son gouvernement de coalition. Churchill, le principal protagoniste de l’entreprise, démissionne du gouvernement et part commander un bataillon d’infanterie en France. En fin de compte, la campagne a précipité la démission d’Asquith et son remplacement comme Premier ministre par David Lloyd George, en décembre 1916.